
« On écrit : “Il la quitta ce soir-là et ne devait plus jamais la revoir.” Ce “devait” est bien un imparfait, par rapport à la temporalité du lecteur. Mais c’est un futur par rapport à celle du personnage. “Il ne devait plus jamais la revoir” signifie que le destin l’a décidé, qu’elle a passé sous un autobus deux semaines plus tard, ou qu’elle est partie pour Tarbes, où elle a fini sa vie comme gardienne du jardin public cher à Jean Paulhan. »
En français, nous utilisons régulièrement deux temps pour exprimer le passé : le passé simple et un temps qu’on dit « imparfait ». C’est ce temps contradictoire, éminemment littéraire, qu’explore pour nous Jacques Drillon. Parcourant les textes de Proust, Flaubert ou Balzac, il nous en dévoile toutes les subtilités et nuances. « Il était une fois », n’est-ce pas le début de toute belle histoire ?
Jacques Drillon est né à Paris en 1957. Ancien professeur de linguistique, il est aujourd’hui journaliste au Nouvel Observateur. Il a publié plusieurs ouvrages sur la grammaire, la littérature, la musique, dont le petit bijou Traité de la ponctuation française (Gallimard, 1991).